Millennium Actress

mv5bnmy4ndeyymqtodq3mc00nja1ltkwm2ytyjuyntyxytdlnde4xkeyxkfqcgdeqxvyntayodkwoq-_v1_sy1000_cr006661000_al_Sennen joyû Film d’animation japonais (2001) de Satoshi Kon – 1h27

Après la destruction d’un grand studio japonais, un journaliste cinéphile et son cameraman se rendent à la maison isolée de Chiyoko Fujiwara, une actrice emblématique du studio qui avait étrangement interrompu sa carrière…

N’adhérant pas forcément à mon grand enthousiasme sur Your Name de Makoto Shinkai, un ami mordu de japanime m’a fait fermer mon clapet en doutant de mes connaissances sur l’animation japonaise. Comme il est très sympa et certainement pas du genre à vous laisser croupir dans l’ignorance, il m’a prêté quelques mangas pour faire meilleure figure, auxquels j’ai ajouté quelques achats de vidéos de mon côté. Idéal pour ne pas devenir comme la grande partie de la critique française qui sort de son chapeau le sempiternel « nouveau Miyazaki » au premier animateur japonais qui vient, parce qu’ils ne connaissent que Le Voyage de Chihiro. Quand bien même je connais Takahata, Otomo, Oshii ou Hosoda, je vais donc ces prochains jours approfondir mes connaissances sur l’animation japonaise, et je vais commencer par Millennium Actress, deuxième film de Satoshi Kon, un maître qui nous a quitté bien trop tôt, après Perfect Blue (1997) que je viens aussi d’acheter en bluray.

Ce deuxième film de Satoshi Kon est d’ailleurs né grâce à un fan de Perfect Blue, le producteur Taro Maki, qui a approché le réalisateur en lui demandant grosso modo un film à la narration en trompe-l’œil semblable mais sans recourir au suspens. C’est donc Millennium Actress qui sera le fruit de cette commande et le film, racontant la destinée d’une actrice traversant le cinéma japonais, ne pourrait laisser de marbre aucun cinéphile digne de ce nom. Nous identifiant directement au journaliste admirateur, Kon confronte notre amour cinéphile pour les stars et les icônes au mystère insondable et essentiel de celles-ci. Dans un film plus apaisé que Perfect Blue, troquant le thriller contre le mélodrame, Millennium Actress rappelle les films de Joseph L. Mankiewicz Eve et La Comtesse aux pieds nus dans lesquels on observait des actrices sous tous les points de vue possibles sans jamais parvenir à saisir leur essence ni définir ce « je-ne-sais-quoi » qui font précisément d’elles des stars.

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L’actrice Chiyoko Fujiwara regarde la clé de sa carrière, justement celle qu’il nous manque.

Millennium Actress atteint ce même vertige sans que sa courte durée (moins d’1h30 !) n’amoindrisse son ambition de mêler admirablement réalité et fiction, de façon d’abord ludique puis progressivement bouleversante. Sublimement créée par Satoshi Kon et son maître (tel qu’il le surnomme) du design des personnages Takeshi Honda, Chiyoko, l’actrice du film, devient une véritable figure romanesque et romantique courant sans cesse après son bel étranger, tiraillée entre la fiction et la réel pourtant inséparables l’un de l’autre, épaississant encore son mystère et son aura en se confondant avec ses personnages. Ceux-ci ont traversé tous les genres emblématiques du cinéma japonais, du chambara au kaiju eiga, en passant par le drame d’après-guerre, ce qui permet en plus à Millennium Actress de rendre hommage au cinéma national. Le tout dans une animation foisonnante dans laquelle Satoshi Kon montre les différentes époques avec moult détails et richesses. Ces époques agrandissent encore le dédale du film dans lequel on aimera évidemment se perdre tant, encore une fois, Millennium Actress tend le miroir aux amoureux – les vrais, les transis – du cinéma.

BASTIEN MARIE


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